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Komintern : « Le bal du rat mort » (1971)

April 27, 2019

L’écoute d’un album tel que celui-ci demande, réclame même, une forme d’abandon de la part de l’auditeur. Le diamant à peine posé sur la platine, la musique s’écoule des enceintes et, déjà, la question se pose : mais qu’est-on en train d’écouter exactement ? La question est à priori facile et, pourtant, il est loin d’être aisé d’y répondre. On en revient à la notion d’abandon du début, il s’agît de laisser la musique couler et d’attraper le feeling au passage. La première face intitulée « bal pour un rat vivant » (apparemment un hommage au rongeur qui a élu domicile dans les Halles de Paris) est une longue suite instrumentale qui voit, sans interruption aucune, le groupe passer par tous les états (l’auditeur aussi). Une suite où les thèmes s’enchaînent, voire se télescopent, un carambolage de musiques tantôt psyché, tantôt prog, mais toujours baroques. Le jazz, mais alors dans tout ce qu’il a de plus free, semble constituer la base, le rythme, mais aussi une affaire de cuivres omniprésents. La guitare, parfois agrémentée d’une pédale wha-wha, ramène la chose, brutalement, comme un électrochoc, vers un terrain plus convenu du rock’n’roll. On y trouve également quelques restes de folk psyché, un sacré bazar, certes, mais quel voyage !

Comme le revers d’une même médaille, la face B, puisqu’il s’agît d’une réédition exclusivement en vinyle, est elle chantée, enfin façon de parler puisque le chant en question est constitué de pets sur le premier titre « Hommage au Maire de Tours ». Entre orgues, clavecin et violons le groupe continue le cirque entamé sur la première face mais le chant ajoute une dimension ésotérique et absconse, typique du rock français du début des années 1970, qui nous fait autant voyager dans le passé que la musique elle-même : « Pongistes de tous les pays… » ; la très belle « Fou, roi, pantin » (que l’on avait découverte il y a quelques années sur le premier volume de l’excellente série « Psyché France »). On y devine un engagement politique à gauche, une utopie, grincante si l’on songe un instant à l’évolution qu’a suivi le monde depuis. Pour conclure, on pourrait dire que ce disque est comme un engrenage infernal, une fois le doigt pris à l’intérieur, difficile de se défaire de cette spirale entraînante et finalement aussi hypnotique que la vision du vinyle noir tournant sur la platine…

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