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The Cure : « Fuck rock n’roll !» (1981)

July 29, 2017

Ô toi, qui que tu sois, qui se cache derrière le mystérieux alias « The Godefather records » (le label qui a édité ce disque pirate nommé en hommage au Parrain de Coppola), chapeau bas ! Digipack soigné, longues notes explicatives, photos millésimés, fac-similés de l’affiche et d’une place de concert garanties d’époque plus la liste intégrale des dates de la tournée « Picture tour 1981 », force est de constater, on a connu des rééditions officielles bien moins soignées ! Du beau boulot, vraiment. De plus, la qualité sonore (toujours un sujet d’inquiétude quand on met le pied dans le monde souterrain du bootleg) est à l’avenant, ledit concert ayant été enregistré pour le compte d’une radio belge et commence d’ailleurs par une introduction en flamand. Nous sommes au festival belge « Rock Werchter », le 5 juillet 1981. The Cure, puisqu’il s’agît d’eux, est encore un trio composé de Robert Smith (guitare), Lol Tolhurst (le batteur damné) et l’indéboulonnable Simon Gallup (toujours là 36 ans après) à la basse. Le trio n’est pas encore l’énorme machine à tubes que l’on connaîtra quelques années plus tard mais sa réputation commence à grandir. Artistiquement, après un premier album (« Three imaginary boys », 1979) bricolé (et sorti aux US dans une version différente sous le titre « Boys don’t cry »), le groupe se trouve dans une phase cruciale, au coeur d’une dark trilogie commencée avec « Seventeen Seconds » (1980) et poursuivie avec Faith l’année suivante. Surtout, le groupe est à la veille de sortir son premier chef d’œuvre certifié « Pornography » (1982) qui conclura ladite trilogie (plus tard, Robert évoquera une autre trilogie composée des album « Pornography », « Disintegration » -1989- et « Bloodflowers » -2000-). Disons le de suite, ce concert est d’une qualité superlative. Naviguant en eaux troubles, cet enregistrement dégage une magie rare. Hypnotique, sombre, la cold wave des Cure est un divin poison pour vos oreilles : « The Holy Hour », « In Your House », « Accuracy », « M », la plus rapide « Primary », « Other voices » (on pourrait citer l’intégralité de la set list, arrêtons-nous là) autant de titres à la fois minimalistes et pourtant obsédants. Comme un groupe en train de sombrer entraînant l’auditeur dans sa chute vertigineuse (« All cats are grey », « The Drowning man »). Nous assistons ici à la naissance d’un grand groupe ni plus, ni moins. Au point qu’il n’est pas déraisonnable de considérer cet enregistrement comme une pièce majeure de leur discographie, bien plus essentielle que les autres live disponibles officiellement par ailleurs. Le titre, assez explicite, est une dédicace bien peu amène à l’endroit de Robert Palmer qui doit leur succéder ce soir là sur la scène du festival. Les notes explicatives, citant Robert Smith dans son livre « Ten imaginary years » nous éclairent sur le sujet : « On venait de commencer depuis à peine une demi-heure et tout le monde était déjà en retard. C’est alors que les roadies de Robert Palmer ont commencé à nous faire signe d’arrêter :  Si vous n’arrêtez pas nous allons vous débrancher ! Simon s’est rapproché du micro et à gueulé : Fuck Robert Palmer, fuck rock n’roll, c’était brillant ! » Pour se venger, le trio s’est alors lancé dans une version ralentie à l’extrême de « A forest », le dernier titre du set, qui s’étendra au final sur près de dix minutes. Une version exceptionnelle, de quoi faire entrer ce concert encore un peu plus dans la légende et faire de ce pirate un chef d’œuvre des Cure au même titre que les officiels « Pornography » et « Disintegration ».

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