C’est une histoire vieille comme les débuts du rock’n’roll, celle de l’album perdu. Le disque mythique, jamais sorti officiellement dans le commerce, objet de fantasmes insensés, que personne n’a jamais entendu et que tous, pourtant, s’accordent pour définir comme un chef d’œuvre. La mythologie fait partie de la légende et les, nombreux, disques perdus forment un corpus parallèle, une discographie fantôme, un objet de désirs pour fans et autres collectionneurs. Dans le genre, l’objet du jour se pose là. « Pretty Africa », œuvre du chanteur reggae Desmond Dekker, accompagné du groupe vocal The Aces. Nous sommes en 1973, Dekker et son groupe sont en studio, au Chalk Farm, et les sessions sont supervisées par les producteurs Bruce White et Tony Cousins. La musique à quant à elle été enregistrée en Jamaïque, il ne reste plus qu’à enregistrer la voix et le nouvel album de Dekker est dans la boîte. Sauf que pour une raison ignorée de tous, le disque ne sort pas et les bandes prennent la poussière sur une étagère du label Trojan Records. Quarante six années s’écoulent avant que l’album ne voit finalement la lumière, le jour du disquaire day (le 13 avril dernier). Et c’est toujours un peu particulier de finalement découvrir un disque que plus personne n’attendait vraiment alors que le chanteur est décédé en 2006… En l’espèce on n’est pas vraiment déçu et l’album, 12 titres, se révèle une excellente surprise. Reggae pur sucre, roots et ensoleillé (« Was a sunny day ») plein de groove auquel les claviers ajoutent une note de soul sans oublier la vocation militante inhérente au genre (« We got to be free »). Et quelle voix ! L’alchimie est parfaite avec The Aces, la guitare est tranchante, la basse énorme produit un groove d’enfer. Attention, la chose est en tirage limité.
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